14 oct. 2010

SOLUTIONS LOCALES POUR UN DÉSORDRE GLOBAL

Quelle bonne surprise d'être tombé sur ce film sorti en avant-première  dans les salles Utopia et en présence de la réalisatrice Coline Serreau. Je dois avouer que jusqu'à ce je vois des films sur l'agriculture productiviste développée notamment en France après la seconde guerre mondiale, des documentaires sur les coulisses de l'élevage intensif et massif des bovins destinés à devenir l'ingrédient de base de la Junk Food de Mac-Do et consort ainsi que l'intérêt porté aux répercutions désastreuses de la culture des  Organismes Génétiquement Modifiés, je n'avais pas vraiment la fibre écolo... Pire que ça, j'étais persuadé que l'avenir de l'humanité se trouvait dans les mégalopoles et si l'odeur de l'asphalte après la pluie m'enivrait, la cambrousse sous un ciel gris me foutait un bourdon terrible. On ne commande pas à ses sens mais on peut faire marcher son intelligence quand les fruits et légumes de la supérette au coin de la rue n'ont plus la saveur gardée par la mémoire gustative de l'enfance. On peut faire fonctionner ses neurones et se demander si un pays qui ne produit plus ce dont il a besoin pour se nourrir n'est pas en danger de pénurie alimentaire en s'en remettant aux seules lois du marché. Et c'est précisément là que le film de Serreau a fait tilt...

"Le dérèglement écologique mondial est une conséquence directe de notre système de production et de consommation. Il en résulte une crise profonde qui menace gravement la sécurité alimentaire de l'humanité. Pourtant, des solutions existent. Et toutes se fondent sur l'élaboration d'un autre type de société. En une vingtaine d'entretiens, Coline Serreau nous présente des alternatives déjà mises en oeuvre partout dans le monde. Acteurs du changement, des paysans, des agronomes, des économistes ou des philosophes témoignent de la vitalité d'une société nouvelle, encore latente et minoritaire, mais bientôt visible et majoritaire. Théories, analyses et réponses pratiques se mêlent pour interpeller et éveiller en nous le désir d'agir et le plaisir d'envisager une vie nouvelle. Il existe de multiples techniques (culture biologique, semis direct, compostage, bois raméal fragmenté, pesticides et engrais naturels...) pour rétablir un lien honnête entre le champ et l'assiette. De ce lien rétabli pourrait naître une démocratie nouvelle instaurant l'autonomie locale, la redéfinition de nos valeurs et du concept de richesse ainsi que le rééquilibrage du pouvoir entre les sexes."

Comme son titre ne l’indique peut-être pas, Solutions locales pour un désordre global est un film sur l’agriculture. Le documentaire est à la fois l’anti-thèse et le complément de long-métrages comme We Feed the world d’Erwin Wagenhofer ou Food, Inc de Robert Kenner, qui détaillaient (respectivement en Europe et aux Etats-Unis) les dérives de l’agro-industrie : expliquant en quoi et pourquoi le modèle hérité de la Révolution verte n’est pas durablement soutenable (d’un point de vue économique, sanitaire, écologique), il met l’accent sur des solutions alternatives, et va à la rencontre des francs-tireurs qui résistent au modèle dominant. D’un côté le complexe agro-industriel, les organismes génétiquement modifiés, le développement annoncé des bio-carburants, de l’autre le bio, la polyculture, la relocalisation de la production et les circuits courts…
Solutions locales… vaut d’abord par le charisme de ses intervenants, qui chacun dans son domaine ou sa région fait figure d’irréductible gaulois face au rouleau-compresseur des multinationales : penseurs et scientifiques (Serge Latouche, économiste, Lydia et Claude Bourguignon, derniers spécialistes de la micro-biologie des sols), militants associatifs (Kokopelli qui sauvegarde la bio-diversité des semences), paysans comme Pierre Rabhi… Cette diversité d’approches permet au film d’alterner considérations historiques générales (sur le recyclage agricole, après-guerre, des produits de l’industrie chimique militaire, sur la dépossession absolue subie par les agriculteurs, sur l’échec de la Révolution verte à remplir sa principale promesse, éradiquer la faim) et, c’est ce qui fait sa spécificité, démonstrations très concrètes (sur les méthodes de culture sans labour, les fertilisants naturels, etc). Solutions globales… n’hésite pas à mettre les pieds — et les mains — dans la glaise : à plusieurs reprises, la caméra s’approche pour détailler l’apparence d’un légume ou d’une motte de terre, comme si le spectateur pouvait, de son fauteuil de cinéma, goûter ou humer la terre et ses bons produits…
Le bio peut-il nourrir le monde ? Le film ne m'a pas pour autant convaincu, montrant d’un côté (dans les pays riches) les filières "bio" et AMAP, qui, par leur surcoût ou leurs contraintes, s’adressent à une clientèle forcément restreinte (classes aisées des centres urbains) ; de l’autre, dans les pays pauvres, une agriculture vivrière qui permet de nourrir les gens qui travaillent sur l’exploitation, mais guère plus. On voit bien que dans un cas comme dans l’autre, ce sont moins des querelles techniques que des enjeux de civilisation (dans les pays riches le changement des modes de consommation, dans les pays pauvres l’inversion du mouvement massif d’exode rural).

Je considère que ce film pourrait être diffusé dans les collèges, les lycées... C'est un documentaire à faire tourner, la conscientisation des esprits n'a pas de prix.



2 commentaires:

  1. le lien Dl ne fonctionne pas garçon !!?
    Beaucoup entendu parler de ce film et même dans ma campagne il a tourné et tourne encore il me semble, et pourtant pas encore vu (pas facile de bouger pour moi tu le sais), d'où mon impatience !!

    Ps : je sais pas ce que j'ai foutu maintenant je suis doublement membre !! Bon disons que ça en fait toujours un de plus !! Un coup je matte vite fait d'un oeil, de l'autre je fouille plus précisément des deux !!
    Biz

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